Festival de Cannes 2022 | Protection de la création: intervention de Denis Rapone à la table-ronde CNC
Seul le prononcé fait foi
Chers amis,
Je tiens à vous dire que combien je suis heureux de m’adresser à vous aujourd’hui.
C’est un immense plaisir que de pouvoir se retrouver, se voir et s’approcher après ses années de privation et il est encore plus plaisant de le faire dans ce cadre, sur la plage du CNC. Merci à celui-ci de nous y recevoir et d’avoir permis l’organisation de cet échange en partenariat avec l’Arcom.
C’est en ma qualité de membre de cette toute nouvelle institution qu’est l’Arcom que je m’adresse à vous aujourd’hui. C’est la première intervention partenariale de cette autorité dans le cadre d’un évènement culturel de cette ampleur et je m’en réjouis particulièrement. Nous sommes plusieurs à avoir oeuvré, pour que puisse naitre cette nouvelle instance de régulation, à la fois plus agile et plus puissante que ne pouvaient l’être l’Hadopi et le CSA au service de la création. Je suis heureux qu’elle prenne aujourd’hui place à vos côtés, aux côtés de la création.
Nous partageons un combat fédérateur : celui de protéger la création française et sa vitalité contre le fléau prédateur que représente le piratage. Cela fait bien longtemps (puisqu’en 2014 un rapport de Mireille IMBERT QUARETTA remis à Aurélie Filipetti sur la nécessité d’outils opérationnels de prévention et de lutte contre la contrefaçon en ligne) que nous appelions de nos vœux de nouveaux moyens pour lutter contre l’évolution des pratiques illicites. Aujourd’hui, nous y sommes : l’autorité publique dispose de compétences élargies au service de la protection de la création, nous n’avons plus qu’à nous en saisir et à les déployer avec pugnacité et détermination !
Nous ne partons pas de rien, bien sûr…
1 - Depuis 10 ans déjà, un travail remarquable a été accompli
Les ayants droit ont, en effet, obtenu des résultats exceptionnels au cours de ces 10 dernières années. Il est très important de saluer le travail que vous avez patiemment et inlassablement mené en multipliant les actions en justice pour obtenir le blocage des services qui organisent la contrefaçon à des fins lucratives. Je crois qu’en 10 années de mise en œuvre, jamais l’une des actions judiciaires que vous avez engagées n’a été perdue. Des centaines de services illicites sont actuellement sous le coup d’une mesure de blocage, ce qui a d’abord permis d’endiguer la progression du piratage, puis, depuis 2017, d’obtenir sa régression constante.
Bien sûr, l’autorité publique, par ses démarches à l’égard des internautes, a pris aussi toute sa place dans cet effort collectif de lutte contre le piratage. La procédure de réponse graduée, les actions de communication et la sensibilisation mise en œuvre auprès des publics scolaires et de la communauté éducative ont concouru à accompagner les usagers vers des pratiques numériques plus respectueuses du droit d’auteur.
2 - Malgré tous les efforts conjugués de l’autorité publique et des ayants droits, des défis restent toujours à relever
En effet, vous le verrez à travers les interventions qui vont suivre, les pratiques illicites se maintiennent à un niveau qui reste élevé, trop élevé... Plusieurs millions d’internautes continuent de se rendre chaque mois sur des services contrefaisants. Les ayants droit sont contraints de s’attaquer judiciairement à des services dont l’illicéité ne fait pourtant pas de doute et les services faisant l’objet de décisions de blocage réapparaissent hélas souvent, dans les jours qui suivent la décision du juge, depuis une adresse légèrement différente.
Ces atteintes graves et répétées au droit d’auteur, perpétrées à grande échelle ne sont pas acceptables. Le secteur de la création, qui a subi de plein fouet les effets de la crise sanitaire, a besoin de toute son énergie pour donner à la culture française cette vitalité et cette richesse dont nous sommes si fiers. Le piratage en bride le plein épanouissement.
Par ailleurs, le fonctionnement de l’univers numérique ne cesse d’évoluer. Ceux qui organisent la contrefaçon en ligne sont prêts à rivaliser d’ingéniosité pour mettre à mal les stratégies déployées par les défenseurs de la création. La lutte contre le piratage doit être une politique dynamique, alerte, toujours prête à se renouveler.
C’est le temps pour l’autorité publique d’entrer en jeu et d’inscrire avec force son action dans le cadre des nouvelles opportunités qui s’offrent à elle.
3 - Les nouvelles opportunités
La loi du 25 octobre 2021, qui a porté création de l’Arcom, l’a également dotée de nouveaux moyens d’action pour mieux assurer, aux côtés des ayants droit, la protection de la création sur internet.
Désormais, l’autorité peut identifier les services illicites en amont des procédures judiciaires conduites par les ayants droit et, à l’issue de ces procédures, demander directement le blocage des services qui tenteraient de contourner les décisions obtenues devant le juge.
L’Arcom a eu l’occasion de mettre en place des dispositions similaires pour protéger les manifestations et compétitions sportives et les résultats obtenus, après quelques mois seulement sont, vous le verrez, spectaculaires.
Nous pouvons nous réjouir que la France ait ainsi choisi de faire de la protection de la création et de l’éradication du piratage un objectif majeur de politique publique. Cet objectif, seule notre détermination et notre mobilisation conjuguées, acteurs de la création et puissance publique, permettront de l’atteindre. Je suis confiant dans le succès de ce combat commun qui n’est rien d’autre que celui de la préservation de notre diversité culturelle et de ses talents créatifs. Un très beau combat, donc !
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En chiffres | Le piratage de contenus sportifs et culturels
- 435.57 Ko
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