Propos d'ouverture de Roch-Olivier Maistre aux Assises de la radio
Seul le prononcé fait foi
Mesdames et messieurs les présidents et directeurs,
Mesdames et messieurs,
Chers amis,
Avec l’ensemble des membres du collège, je suis très heureux de vous voir si nombreux ce matin répondre à l’appel du 18 juin lancé par l’Arcom : jour historique s’il en est, alors que nous célébrons cette année le 80ème anniversaire du débarquement, pour parler du rôle central joué par le média radio dans nos mémoires collectives et nos vies quotidiennes.
Les Assises de la radio, que nous avons le plaisir d’organiser depuis 2021, sont l’occasion pour toutes celles et tous ceux qui s’intéressent à ce média devenu centenaire de se retrouver afin de partager ensemble réflexions et analyses et construire un horizon commun face aux défis inédits qui assaillent la sphère audiovisuelle.
A cet égard, l’édition 2024 est, vous le savez, un peu particulière puisque l’Arcom publie aujourd’hui son Livre blanc sur l’avenir de la radio. J’avais annoncé le lancement de cette initiative, inspirée d’une initiative identique de nos amis britanniques, à l’occasion d’une table-ronde organisée au Sénat en janvier 2023 et consacrée au déploiement du DAB+. Nous nous étions alors engagés dans ce vaste chantier avec l’idée de dresser un état des lieux du média radio en France et d’aborder la question majeure de la transition de la diffusion en FM vers la diffusion en DAB+, sur l’ensemble du territoire national, à la fois métropolitain et ultra-marin.
Nous nous étions fixés comme objectifs d’identifier les prérequis et les conditions de réussite de cette transition afin de permettre au secteur de se projeter vers cette perspective à moyen et long terme, à la lumière d’exemples internationaux.
Après de longs mois de travail et une consultation de l’ensemble des acteurs du secteur, à la faveur d’un large cycle d’auditions, nous sommes désormais en mesure de partager le fruit de nos réflexions et le plan d’action qui l’accompagne. C’est vous dire combien, avec l’ensemble du collège et des équipes de l’Arcom, nous étions impatients et combien je suis, pour ma part, heureux et fier que nous ayons mené à bien cette ambition.
Avant même d’en venir au contenu de ce document, permettez-moi d’avoir un mot très chaleureux pour remercier les artisans talentueux et patients de ce livre blanc. Ils ont porté et mené à bien ce chantier en parallèle d’une charge de travail habituelle déjà très lourde.
Je voudrais d’abord remercier Hervé Godechot, qu’on ne présente plus dans ces murs et qui s’est considérablement impliqué dans ce travail, ainsi que Frédéric Bokobza, directeur général adjoint et fin connaisseur des dynamiques nationales et européennes du média radio, qui a piloté aux côtés d’Hervé ce dossier majeur. Je tiens également à souligner l’engagement, tout au long de l’élaboration du livre blanc, de la direction de la radio et de l’audio numérique de l’Arcom, dont je salue en particulier le directeur François-Xavier Meslon et son adjoint François-Xavier Bergot, qui en était le chef de projet. Je l’ai dit, le Livre blanc était une mission supplémentaire confiée à cette direction par ailleurs très sollicitée dans son activité quotidienne et je mesure pleinement la mobilisation qu’elle impliquait.
Pour épauler les directions concernées et rédiger le rapport, l’Arcom a eu recours à une rapporteure de talent, qui a rejoint l’équipe dès le lancement du projet et que je veux remercier en mon nom personnel et au nom de l’institution : Déborah Dadoun, jeune magistrate à la Cour des comptes et chargée de mission auprès du Premier président. Elle a fait la preuve que décidément, la valeur n’attend pas le nombre des années !
Je souhaite enfin remercier l’ensemble des parties prenantes à l’élaboration de ce rapport, qui nous ont accompagné dans nos réflexions : les acteurs de la radio bien sûr, du secteur public comme privé, des opérateurs associatifs comme commerciaux, les diffuseurs, mais aussi le ministère de la culture, les équipementiers, les distributeurs ou encore nos homologues européens.
Sans dévoiler le contenu du Livre blanc, qui vous sera présenté dans quelques instants par Hervé, je voudrais juste revenir rapidement sur la dynamique qui a guidé ce projet et les suites que nous espérons lui donner – ou plus exactement que nous espérons que vous lui donnerez.
Ce livre blanc vise à répondre à une question simple : quel avenir pour le média radio ? Il fait le constat que, forte de ses audiences et de l’attachement que lui portent les Français, la radio fait aujourd’hui face à des interrogations structurelles sur son modèle. D’une certaine façon, elle est à la croisée des chemins. De nouveaux relais de croissance se font jour, comme le podcast ou les enceintes connectées, mais de nouveaux concurrents ont émergé. L’écoute évolue, se fragmente parfois, baisse tendanciellement, mais la confiance dans le média demeure. La FM, mode de diffusion hertzien qui a fait ses preuves, est prédominant, mais il a désormais atteint ses limites. Un autre, le DAB+ se déploie depuis plusieurs années en Europe et en France, y compris outre-mer, avec des atouts évidents, mais il soulève encore des questions. De son côté, l’écoute sur internet progresse régulièrement.
Dans cette situation, le média radio a besoin d’un horizon clair pour se projeter dans l’avenir et écrire un nouveau chapitre de son histoire.
Il doit pour ce faire sortir de l’incertitude et préparer avec confiance et détermination la bascule de la radio en tout numérique, dans un contexte où le poids de l’écoute en IP est appelé à croître. Cette bascule doit se faire au bénéfice de tous les publics, qui ont témoigné de leur fidélité à la radio depuis les premières émissions émises à partir de la Tour Eiffel en 1921, et de toutes les radios, dont la présence incarne la richesse et la diversité.
Cette bascule doit aussi se préparer avec soin : c’est tout l’objectif de ce livre blanc. Il propose une stratégie claire, adossée à un calendrier et à une analyse des besoins, à la lumière des exemples de nos principaux voisins européens. Il soumet au débat public plusieurs mesures pour assurer la résilience dans le temps du modèle économique de la radio. Bref, il offre un état des lieux complet et une feuille de route cohérente.
Quelles suites maintenant lui donner ? Chacun connaît la mise en garde de Balzac contre le risque de « disserter au lieu d’agir ». Comme magistrat des comptes, je sais que les bons rapports sont ceux qui se transforment en actes, en politiques publiques, en dynamiques concrètes : ceux qui ne sont qu’un point de départ, et non une ligne d’arrivée. Nous espérons donc que tout le travail accompli au service de cette réflexion mobilise l’ensemble de notre écosystème radiophonique, avec le soutien des pouvoirs publics, pour que ce média auquel nous sommes tous ici très attachés fête encore nombre d’anniversaires.
Le Livre blanc le dit bien : la radio a été intrinsèquement liée à l’histoire du 20ème siècle de notre pays, permettons-lui de rester aussi un grand média du 21ème siècle. Le régulateur audiovisuel et numérique prendra toute sa part à cet effort pour et se mettra en ordre de marche sans attendre pour les actions relevant de sa compétence. Je le dis ici : l’Arcom sera toujours aux côtés des opérateurs pour les accompagner dans leur transformation, en favorisant un environnement propice, en offrant son expertise, en entendant et en relayant ses doutes, ses questions, ses besoins. Mais c’est vous qui faites vivre la radio ! C’est vous qui, collectivement, piloterez le passage de la radio au tout numérique !
Un mot du programme qui nous attend, élaboré avec le soutien très précieux de Didier Si Ammour que je remercie :
- La présentation de notre livre blanc par Hervé Godechot sera suivie d’une première table-ronde consacrée aux évolutions dans la diffusion et l’écoute de la radio, avec Basma Bonnefoy, Pierre Boucard, Cécile Chambaudrie, Jean-Paul Dietsch et Justine Gheeraert.
- Nous aurons ensuite l’occasion d’évoquer des exemples étrangers de promotion du DAB+, avec une présentation animée par Eric Aldebrecht et Jacqueline Bierhorst.
- Une deuxième table-ronde, qui s’inscrira directement elle-aussi dans les suites du Livre blanc, s’intitulera « comment assurer durablement le succès du DAB+ ? ». Elle réunira Charles-Emmanuel Bon, Emmanuelle Le Goff, Alain Liberty, Florence Philbert et Christophe Schalk.
Je tiens à remercier très chaleureusement l’ensemble des intervenants de cette matinée pour leur temps et leur engagement aux côtés de l’Arcom, non seulement pour les assises de la radio mais bien sûr tout au long de l’année. Nous avons la chance de pouvoir profiter ce matin de leur expertise et de leur vision du média radio, qui seront très précieuses pour avancer collectivement vers le nouvel horizon de la radio numérique.
Car quoi qu’il arrive, en ce 18 juin, la flamme de la radio française ne s’éteindra pas ! Merci pour votre écoute. Je cède sans plus tarder la parole à Hervé.